Histoire en Buch

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009 - Une étrange et fragile planète (150e anniversaire d'Arcachon)

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150e anniversaire d'Arcachon

Chronique n° 009


Une étrange et fragile planète

* * *

On ne le répétera jamais assez, Arcachon repose sur un socle 
mobile, au bord d’un monde étrange où les eaux douces et salées se 
mêlent à des terres qui vont et viennent, labourées par des courants 
puissants ou de petites rigoles qui se perdent dans des herbes dures, 
couvertes d’embruns et de sel et exhalant une moite odeur de vase 
saline et d’humidité chaude, une de ces odeurs qu’on n’oublie jamais, 
comme le disait Bonaparte des senteurs du maquis corse.  Arcachon se 
trouve donc au cœur d’une étrange et fragile planète de 15 500 
hectares, imbibée de lande, remplie de pulsations océaniques et 
découpée de tentacules qui se gonflent au rythme des marées.

     Avec toutefois un gros ennui : au nord, la planète se comble au 
rythme lent mais inexorable d’un centimètre au maximum par an. Les 
sables s’accumulent, les algues prolifèrent et l’eau circule mal. 
Qu’on se le dise bien. Non seulement, Arcachon s’accroche à un sol 
mouvant mais si l’on n’y prend garde, bientôt, trop tôt, trop vite, 
il ne dominera plus que des près salés spongieux car l’on sait que 
nos terres se transforment à la grande vitesse des courants de marées 
d’équinoxe. Fort heureusement, on pompe, on pompe, on pompe, à grands 
renforts d’euros, pour éviter le pire.

     Ce qui n’empêche point que se poursuivent les modifications 
incessantes qui marquent l’évolution du site. Car il va continuer de 
se modifier. De très savantes extrapolations ne prévoient-elles pas 
que, dans la prochaine décennie, le cap Ferret s‘allongera et que la 
pointe d’Arcachon se creusera autour de La Salie  et même, on le voit 
bien déjà, au pied nord de la dune de Pilat ? Ensuite, le banc 
d’Arguin, déjà bien malmené, disparaîtra car les deux passes auront 
fusionné. Enfin, en 2100, deux chenaux du nord se confondront et 
aboutiront dans un chenal central. Ainsi, le Bassin continue de 
profondément changer. Il n’a donc  rien d’inerte et par conséquent, 
ce n’est  ni un lac, ni une lagune, ni un marécage, surtout pas une 
baie, ni un étang et encore moins, quoi qu’en disent de très 
méchantes langues, une vulgaire mare et encore moins un bain de pieds 
pour Bordelais. En vérité, oui, nous avons bel et bien un bassin à 
nul autre pareil et pas autre  chose. Mais c’est beaucoup car c’est 
unique.

     Ce Bassin, on l’a d’abord appelé Petite mer de Buch puis Havre 
d’Arcachon quand Choiseul rêvait, le malheureux, d’y installer un 
port militaire. Mais c’est au XVIIe siècle qu’il a pris son titre de gloire 
et son originalité insaisissable. Il sera, désormais et pour 
toujours, un Bassin qu’on trouve baptisé Archix en 1375, Arcasson en 
1420, Archasson en 1436 et Archaxon en 1407. Mais, quel que soit son 
nom, il reste, ce qui fait son charme, un extraordinaire entrelacs 
d’artères, de veines et de veinules qui bat comme un cœur, au rythme 
des marées. Son exploration, c’est une autre histoire. A
suivre ...

Jean Dubroca

Chronique sur Radio Côte d'Argent - 90,4 Mhz

(25 janvier 2007)

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