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008 - La courte échelle du temps (150e anniversaire d'Arcachon)

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150e anniversaire d'Arcachon

Chronique n° 008


La courte échelle du temps

* * *

Donc, Arcachon vit au bord d’un Bassin qui se modifie vite et 
constamment. Si l’on ne voit pas là de l’aventure, où serait-elle ? 
D’autant plus que la fulgurance des changements se mesure sur une 
génération  à peine. Car elle est permanente, cette transformation du 
Bassin, la houle atlantique et les vents musclés par leur course 
ininterrompue depuis l’Amérique, trimbalant, depuis des millénaires, 
des montagnes de sable qui se hissent sur nos côtes. Résultat : bien 
qu’aujourd’hui ils ne migrent plus vers  le sud que de cinquante 
centimètres par an, les bancs des passes réservent des surprises 
après chaque hiver et la pointe du cap Ferret a grandi de quatre 
kilomètres en trois cents ans.
     Si bien aussi que, du côté du Pilat, la Grande dune, malgré sa 
hauteur, accuse à peine ses cent cinquante saisons touristiques et 
que, si elle cesse de se surpasser, une voisine proche s’est, depuis 
peu, mise dans l’idée d’avaler le camping des Flots bleus et même la 
route de Biscarrosse. Ce qui constitue une croissance express par 
rapport à des phénomènes géologiques que, généralement, on évalue en 
ères pour essayer de s’y retrouver. Rien ici, de toutes ces énormes 
échelles du temps.
    On compte à peine en quelques milliers d’années pour observer des 
mutations radicales. Tout a commencé dans un univers paisible, voici 
à peine 6000 ans. A ce moment-là, un petite rivière côtière, bien 
gasconne d’ailleurs puisqu’elle porte deux noms, selon l’endroit 
depuis lequel on  la regarde passer Leyre ou “la” Leyre donc, coulait 
paisiblement et se jetait dans l’océan, au sud-ouest de l’actuel 
bourg de Lège. Très exactement au Grand Crohot, le grand trou, en 
gascon. On dit que lord Talbot y débarqua, avant de venir prendre sa 
pâtée à Castillon, ce qui bouta l’Anglais hors de Guyenne en 1453. 
Avant d’ailleurs que ce même Anglais, assoiffé de douceurs 
climatiques, ne revienne en masse cinq siècles après, en achetant des 
maisons du Gers à la Dordogne.
     Fin d’une digression, au cours de laquelle on n’a cependant pas 
perdu de vue qu’il y a 2400 ans le niveau marin avait 
considérablement monté. Son sable, transporté par le vent et les 
courants rejette alors, en le bouchant partiellement, l’estuaire de 
Leyre, d’abord vers l’ouest, puis vers le sud ouest. Ainsi, ce qui 
allait devenir le Bassin, n’arrêtait pas de changer de forme, à tel 
point qu’en 1300 les passes se trouvaient au nord de l’actuelle île 
aux Oiseaux. Une île qui ne l’était pas encore, car il a fallu que le 
courant principal du Bassin, le Teychan, la séparât du rivage 
arcachonnais. D’aucuns, de mauvaise foi évidente, prétendent qu’ elle 
ne serait qu’un vulgaire mais solide banc de sable qui aurait résisté à 
des courants tourneboulés par toutes ces modifications. Toujours est-
il qu’au centre d’un monde, on le voit aussi mobile que fragile, 
cette île aux oiseaux, dans le premier cas, serait arcachonnaise ; 
dans le second cas, il serait normal qu’elle fût testerine. Ce que 
croyaient les Testerins, de grands malhonnêtes - à l’époque - qui la 
volèrent à leur captal en 1550. Mais c’est une autre histoire. A 
suivre ...

Jean Dubroca

Chronique sur Radio Côte d'Argent - 90,4 Mhz

(24 janvier 2007)

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