Histoire en Buch

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Gujan-Mestras raconté par ses rues et lieux-dits (Editions de la SHAA)

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Gujan-Mestras raconté

par ses rues et lieux-dits

Sous la direction de Jean Dazens

138 pages. Prix : 12 €

           Lors de la réunion du conseil municipal du 14 juin 1925, le conseiller Jules Bailly, prenant la parole, fit remarquer à ses collègues «que les rues de la commune de Gujan n'[avaient] pas de noms». A l'évidence, il y avait une part d'exagération dans ces propos; certes, il n'y avait pas de dénominations officielles, mais nombre de chemins et même des rues étaient couramment désignés autrement que par des numéros.

 

Quoi qu'il en fût, Jules Barat, alors maire, reconnut « l'utilité de donner une désignation aux voies publiques mais demanda de surseoir à cette opération pour permettre à la commission de la voirie d'en étudier la réalisation ». C'est ainsi que les registres des délibérations ne livrent que les noms « officieux » de plusieurs voies jusqu ' à la séance « historique » du 26 décembre 1927.

 

Ce jour-là, il est demandé aux élus d'entériner les propositions de la commission de la voirie qui a limité ses réflexions aux quartiers de Mestras et Gujan ; pour La Hume et Meyran, il est en effet indiqué « qu'il est demandé au Syndicat d'Initiative dont font partie des conseillers municipaux d'examiner en commun un projet de dénominations des rues de ces quartiers ».

 

Pour les dénominations mestrassaises et gujanaises, quatre grands principes avaient été retenus:

 

I/ il fallait en quelque sorte tirer des leçons des quatre années de guerre; pour cela on avait retenu de grands capitaines [2], sélectionné des victoires [3], un savant (?), de grands patriotes [2] et des mots - symboles rassembleurs [3] ;

2/ il était apparu opportun de rendre hommage aux anciens maires - du moins à certains [4] ;

3/ il avait paru judicieux de remarquer des personnalités locales [5] ;

4/ enfin, il avait été convenu de « confirmer certaines appellations consacrées par les usages, par le temps » ! Cette catégorie fut de loin la plus fournie, comme pour faire honte au conseiller Bailly !

 

Ce préambule ainsi affirmé pourrait laisser croire que la rédaction du troisième volume des «communes racontées par leurs rues et leurs lieux-dits», qui permet de clore le chapitre « Captalat de Buch », fut chose aisée ; il n'en fut rien. Pour deux raisons essentiellement: si l'on ne peut suspecter les élus gujanais de ne pas avoir examiné certaines dénominations de voies, il faut bien reconnaître que le résultat de leurs réflexions ne fut pas toujours transcrit sur les registres des déli­bérations du conseil municipal; en second lieu, et là réside la plus évidente difficulté pour le cher­cheur et l'historien, les choix furent rarement explicités !

 

Le Dictionnaire aujourd'hui publié est donc le fruit d'un long et difficile travail d'équipe, dont la rédaction finale a été menée sous la direction de Jean Dazens, grand connaisseur du passé de... Mestras mais aussi de Gujan et autres quartiers. Il convient par conséquent de remercier pour leur concours : Mmes Janine Bourzat, Rachel Hugues, Jacqueline Legrand, Francine Maubourguet et Yolande Vidal, ainsi que MM. Charles Daney et Hugues Teyssier, à qui l' on doit le « schéma » retenu pour chacune des rubriques.

 

Comme pour les précédents titres consacrés à Arcachon et à La Teste, les notices qui ont été rédigées ne sont pas les éléments d'un puzzle qui, mis dans un ordre à découvrir, livreraient une histoire de Gujan-Mestras qui reste toujours à écrire; mais en fournissant des pistes, en soulevant de multiples interrogations et en dévoilant les lacunes de nos connaissances actuelles, elles devraient susciter des axes de recherches et, partant, des vocations chez tous ceux qui se passionnent pour le passé de « la capitale de l'huître ».

 

Non seulement des pans entiers du Gujan-Mestras d'hier restent à découvrir, mais surtout ­et la préparation du présent ouvrage en a permis la cruelle expérience - des épisodes que l'on croyait connus n' ont été, jusqu'ici, abordés que de manière superficielle sinon fragmentaire : deux exemples pris dans 1'histoire dite moderne justifieront ce propos.

 

Ainsi, pour avoir marqué le paysage gujanais d'une empreinte visible encore de nos jours, la colonisation de Daniel Nézer et l'expérience malheureuse de la Compagnie Agricole et Industrielle d' Arcachon mériteraient, l' une et l' autre, un historique complet et fouillé.

 

Le texte introductif qui suit, dû à la plume de Charles Daney, explique le découpage du Dictionnaire et l'un des éléments de chaque rubrique: la « localisation », pour laquelle nous sollici­tons l' indulgence des lecteurs qui pourraient contester certaines lignes de partage entre les différents quartiers ! Loin de nous l'idée de vouloir susciter (ou ressusciter) les querelles fratricides !

 

Les lecteurs voudront bien aussi pardonner l'humour qu'il a paru nécessaire d'introduire, non pas pour contrebalancer le sérieux de l'ouvrage, mais le caractère quelque peu absurde pour ne pas dire ridicule des litanies de fleurs, d'oiseaux, de peintres et de musiciens, sans lien ou sans rapport avec les traditions ou le passé gujanais, ni même - comme on l'a trop rarement entr'aperçu - avec les villas riveraines.

 

Par ailleurs, forts d'une expérience malheureuse pour notre société, nous voudrions insister sur un point capital: « les pages qui suivent sont forcément et, espérons-le, provisoirement incom­plètes ; l'état des archives subsistantes, leur accès réglementé, le flou de certaines sources, quelque­fois même leurs contradictions, conduisent à solliciter la bienveillance du lecteur et, surtout, à lui demander éventuellement son concours pour compléter, corriger et, pourquoi pas, enrichir sur le plan iconographique notamment, un ouvrage qui n'a pas de précédent ». Nous ne doutons pas que cet appel soit entendu et que, pour ce faire, les Gujanais ne manqueront pas d'arpenter leur com­mune avec un reil neuf et l' esprit en éveil.

 

Qui plus est, nous restons persuadés que des archives familiales fourmillent de renseigne­ments qui pourraient éclairer l'origine des anciens noms de rues et des lieux -dits; les actes notariés, en particulier, concernant l'historique des propriétés, seraient d'un grand secours pour élucider quelques dénominations pour le moins obscures. Il nous faut donc espérer que des Gujanais de vieille souche accepteront, le cas échéant, de nous confier des copies de leurs documents familiaux.

 

Qu' il soit enfin permis pour conclure de formuler un vœu en direction des édiles, en charge d'une cité en pleine expansion : pour le bonheur des historiens de demain, pourquoi ne jetteraient-ils pas au feu les dictionnaires spécialisés pour décider des dénominations des voies nouvelles ? Pour­quoi ne chercheraient-ils pas à préserver de l'oubli les métiers et corporations qui ont fait Gujan­Mestras ? Pourquoi ne mettraient-ils pas à l 'honneur quelques personnages qui ont réellement compté dans la vie souvent rude de leurs parents et aïeux ? Pourquoi ne chercheraient-ils pas, tout simple­ment, à préserver le patrimoine linguistique, géographique, culturel et historique de leur commune en l' inscrivant dans le paysage ?

 

Michel BOYÉ, Président de la Société Historique et Archéologique d' Arcachon